Ouvrir un mur porteur pour créer une cuisine ouverte ou agrandir une pièce est un projet tentant. Mais attention : un mur porteur soutient la structure du bâtiment. Une erreur peut provoquer des fissures, voire un effondrement. Ce guide vous explique les étapes, mais nous recommandons fortement de faire appel à un professionnel.
Avant de commencer : les vérifications
Identifier un mur porteur
Indices qu’un mur est porteur :
- Épaisseur : Généralement > 15 cm (hors enduit)
- Matériau : Parpaing, brique pleine, béton, pierre
- Position : Sous une poutre, dans l’alignement d’un mur de l’étage supérieur
- Son : Plein à la frappe (pas de son creux)
- Plans : Indiqué sur les plans de construction
Indices qu’un mur n’est PAS porteur :
- Cloison de 7-10 cm (placo, carreau de plâtre, brique plâtrière)
- Son creux à la frappe
- Pas de charge au-dessus
Important : En cas de doute, faites intervenir un bureau d’études structure. Une erreur de diagnostic peut être catastrophique.
Les démarches obligatoires
En maison individuelle :
- Étude structure par un ingénieur (obligatoire pour l’assurance)
- Déclaration préalable si modification de façade
En copropriété :
- Accord de l’assemblée générale (vote en AG)
- Étude structure
- Assurance dommages-ouvrage recommandée
Documents à obtenir :
- Note de calcul du bureau d’études
- Plans avant/après
- Descriptif des travaux
Le bureau d’études structure
L’ingénieur structure va :
- Analyser les plans et la structure existante
- Calculer les charges à reprendre
- Dimensionner le linteau (IPN, poutre béton, etc.)
- Définir les appuis et leur renforcement
- Fournir une note de calcul (indispensable pour l’assurance)
Coût : 500 à 1500€ selon la complexité
Le principe : la reprise de charge
Quand on ouvre un mur porteur, il faut reprendre la charge qu’il supportait.
Les éléments de reprise
Le linteau (traverse horizontale) :
- IPN/IPE : Poutre métallique en I (le plus courant)
- HEA/HEB : Poutre métallique en H (charges lourdes)
- Poutre béton armé : Coulée sur place ou préfabriquée
- Lamellé-collé : Pour les structures bois
Les poteaux (si ouverture partielle) :
- Reprennent la charge aux extrémités du linteau
- Métalliques ou béton selon le calcul
Les appuis (jambage) :
- Zone où le linteau repose sur le mur restant
- Longueur minimum : 20-30 cm de chaque côté
Les étapes des travaux
Étape 1 : L’étaiement
L’étaiement soutient provisoirement la structure pendant les travaux. C’est l’étape la plus critique.
Matériel :
- Étais métalliques réglables
- Bastaings ou madriers (pour répartir la charge)
- Planches d’assise
Mise en place :
-
Sous le plancher supérieur (si étage) :
- Positionnez des bastaings perpendiculairement aux solives
- Placez les étais tous les 50-60 cm
- Serrez fermement (sans excès)
-
De chaque côté du mur :
- Étais inclinés prenant appui sur le sol et le plafond
- Répartition de la charge via des madriers
-
Vérification :
- Les étais ne doivent pas bouger
- Pas de craquement ni de mouvement
Attention : L’étaiement doit rester en place jusqu’au scellement complet du linteau (plusieurs jours).
Étape 2 : Le traçage
- Reportez les dimensions exactes de l’ouverture sur le mur
- Ajoutez la hauteur du linteau + les appuis latéraux
- Tracez au niveau laser pour une parfaite horizontalité
Étape 3 : La découpe haute (pour le linteau)
On commence toujours par le haut pour placer le linteau avant de retirer le mur.
- Découpez une saignée horizontale à la hauteur du linteau
- Largeur = largeur de l’ouverture + appuis (2 x 20-30 cm)
- Hauteur = hauteur du linteau + marge
- Utilisez une rainureuse, meuleuse ou perforateur
- Retirez les matériaux délicatement
Étape 4 : La pose du linteau (IPN)
Préparation de l’IPN :
- Traitez contre la rouille (peinture antirouille)
- Préparez les platines d’appui si nécessaire
Pose :
- Glissez l’IPN dans la saignée (à plusieurs, c’est lourd !)
- Calez-le provisoirement avec des coins
- Vérifiez l’horizontalité au niveau
- Scellez au mortier de scellement (ou résine selon calcul)
Le scellement des appuis :
- Le linteau doit reposer sur un appui solide
- Si mur fragile : platine de répartition
- Temps de séchage : 48-72h minimum avant de retirer l’étaiement
Étape 5 : L’ouverture du mur
Une fois le linteau scellé et l’étaiement maintenu :
- Découpez le mur sous le linteau
- Par passes successives (pas tout d’un coup)
- Utilisez une tronçonneuse à disque, meuleuse ou perforateur
- Évacuez les gravats au fur et à mesure
- Conservez les appuis latéraux intacts
Étape 6 : Les finitions
-
Créez les tableaux (côtés de l’ouverture) :
- Enduit de finition
- Ou habillage placo
-
Habillez le linteau :
- Coffrage placo pour masquer l’IPN
- Ou poutre apparente (style industriel)
-
Traitez le sol :
- Comblez la fondation du mur retiré
- Raccordez les revêtements
Étape 7 : Retrait de l’étaiement
Seulement après :
- Séchage complet du scellement (minimum 1 semaine)
- Validation visuelle (pas de fissure, pas de mouvement)
Retirez les étais progressivement, un par un, en surveillant la structure.
Les cas particuliers
Ouverture dans un mur en pierre
Les murs en pierre sont souvent très épais (50 cm et plus) et irréguliers.
Particularités :
- Linteau souvent en bois ou IPN doublé
- Appuis renforcés (la pierre peut s’effriter)
- Découpe plus longue et difficile
Mur porteur avec conduit de cheminée
Si un conduit traverse le mur :
- Le conduit doit être dévié ou chemisé
- Travaux supplémentaires importants
- Intervention d’un fumiste nécessaire
Ouverture en copropriété
Procédure :
- Obtenez l’accord de la copropriété (vote AG)
- Faites réaliser l’étude structure
- Souscrivez une assurance dommages-ouvrage
- Faites réaliser les travaux par une entreprise assurée
- Constatation par huissier avant/après (recommandé)
Budget indicatif
| Poste | Prix |
|---|---|
| Étude structure (bureau d’études) | 500-1500€ |
| IPN (fourniture) | 200-600€ |
| Travaux (main d’œuvre + évacuation) | 2000-5000€ |
| Finitions (habillage, enduit) | 500-1500€ |
| Total ouverture simple (2-3m) | 3500-8000€ |
Facteurs qui augmentent le prix :
- Ouverture large (> 3m)
- Mur épais ou en pierre
- Étage (plus de charges à reprendre)
- Accès difficile (évacuation gravats)
- Copropriété (démarches + assurances)
Pourquoi faire appel à un professionnel ?
Les risques du DIY
- Effondrement : Un étaiement mal fait ou un linteau sous-dimensionné peut provoquer l’effondrement du plancher supérieur
- Fissures : Des fissures peuvent apparaître sur toute la structure, même des mois après
- Assurance : Sans étude structure, votre assurance habitation peut refuser de couvrir les dégâts
- Revente : Un acheteur ou son notaire peut exiger les justificatifs des travaux
Les garanties du professionnel
- Garantie décennale : Couvre les dommages structurels pendant 10 ans
- Étude validée : Le bureau d’études engage sa responsabilité
- Assurance : L’entreprise est assurée pour ce type de travaux
Les signes d’alerte après travaux
Surveillez votre structure dans les mois qui suivent :
Signes inquiétants :
- Fissures qui apparaissent ou s’agrandissent
- Portes/fenêtres qui coincent
- Craquements inhabituels
- Affaissement visible du plancher
En cas de doute : Faites immédiatement intervenir le bureau d’études ou un expert.
Alternatives à l’ouverture totale
Si le projet vous semble trop risqué ou coûteux :
Ouverture partielle (passe-plat)
Moins de charge à reprendre, moins cher, mais effet visuel limité.
Verrière sur muret
Conservez une partie du mur (1m de haut) et posez une verrière. Moins de travaux structurels.
Démolition d’une cloison non porteuse
Vérifiez si une autre cloison peut être supprimée pour gagner de l’espace sans toucher au porteur.
? Questions fréquentes
- Comment savoir si un mur est porteur ?
- Indices : épaisseur > 15 cm, situé sous une poutre ou dans l'alignement d'un mur à l'étage, son plein à la frappe (pas creux). Pour confirmation, consultez les plans de construction ou faites appel à un bureau d'études structure.
- Peut-on ouvrir un mur porteur soi-même ?
- Techniquement possible pour un bricoleur très expérimenté, mais fortement déconseillé. Les risques (effondrement, fissures) sont importants et les assurances ne couvrent pas les travaux sans étude structure préalable. Faites appel à un professionnel.
- Faut-il un permis pour ouvrir un mur porteur ?
- Pas de permis de construire, mais une déclaration préalable peut être nécessaire si la façade est modifiée. En copropriété, l'accord de l'assemblée générale est obligatoire car le mur porteur fait partie des parties communes.